Daff des Unco vient de nous quitter et c’est une partie de ma jeunesse qui fout le camp
Ce n’est pas le genre de nouvelle à laquelle je pouvais m’attendre de sitôt. Daff Lepard, ou plutôt Renan Follain à l’état civil, a mis fin à ses jours chez lui à Berlin. Il avait 46 ans, et souffrait de bipolarité. Il était connu pour être le batteur d’Uncommon Men From Mars, groupe au nom difficilement prononçable mais membre majeur de la scène punk française du début du siècle.
Unco ou UMFM pour les intimes, c’était avant tout une histoire de famille. Celle de 3 frères, nés et ayant grandi aux USA : les jumeaux Daff Lepard (batterie) et Trint Eastwood (guitare, chant), accompagnés de Motor Ed (chant, guitare). Après s’être établis en famille à Serrières (Ardèche) au début des années 2000, c’est là qu’ils débuteront leurs aventures musicales avec l’appui de Big Jim (basse). Formé en 1993 et en hiatus depuis 2013, le groupe aura traversé les décennies au gré des modes du moment : les baggies et les dreadlocks, les shorts larges avec chaussettes montantes, le jean slim et la casquette trucker, les cheveux (dé)colorés, le perfecto à badges, etc.
Donnant principalement dans le skate punk, les Ardéchois ont su mâtiner leur son d’horizons divers, du hardcore le plus sommaire à l’indie rock en passant par quelques incartades acoustiques ou reggae. D’ailleurs, si mes souvenirs sont bons, j’ai pour la première fois entendu le groupe sur la chaîne Game One. La TV consacrée aux jeux vidéo avait pour habitude de réaliser des clips à base d’extraits vidéoludiques, et ils en avaient réalisés un pour le ska-punk parodique Come to Jamaica accompagné des images du jeu Shaun Palmer’s Pro Snowboarder.
Leur carrière est à rebours de ce qu’il se fait traditionnellement. Ils ont ainsi débuté sur une major, ont enregistré aux USA avec quelques pointures du milieu comme les producteurs Ryan Greene (NoFX, Lagwagon, etc.) ou Steve Albini (Nirvana, The Pixies, etc.), et ont sorti rapidement un DVD live ou un EP acoustique. Déçus de l’expérience d’un gros label, ils ont fini par devenir un pilier de la scène indé française.
UMFM, c’était aussi un savant mélange de textes personnels (voire sombres) et de sujets plus légers, comme les aléas de la pratique du skateboard. L’humour avait une large place dans leur univers : dans les paroles des chansons bien sûr, dans leurs différentes apparitions TV ou radio, durant leurs concerts et dans leurs quelques clips. Difficile quand même de ne pas exploser de rire devant celui de Ninja Pebble.
Daff, c’était ce mec derrière les fûts, qui n’était peut-être pas celui qui ressortait le plus du lot dans les quatre mais qui n’en restait pas moins terriblement efficace. Avec son jumeau Trint, ils avaient cette habitude d’avoir bien souvent la même coupe de cheveux ou les mêmes habits, ce qui les rendait encore moins distinguables hors de la scène.
Les Unco font partie des groupes que j’aurai vus le plus de fois sur scène. C’est d’ailleurs là qu’ils étaient les meilleurs : un son toujours aussi propre, une énergie communicative, une alchimie que l’on ressentait facilement. Le tout, bien servi par une setlist sans fausse note et cette touche d’humour qui faisait mouche à chaque fois. Des salles les plus intimistes aux plus gros festivals, ils auront joué des centaines de concerts à travers la France et l’Europe, en plus de quelques excursions américaines ou japonaises. Personnellement, j’ai eu la chance de pouvoir les voir en différents endroits de France et à l’étranger, et sur différentes tournées. De quoi bien apprécier l’évolution de leur son.
J’aimais beaucoup certains skeuds, un peu moins d’autres, mais il y avait toujours des morceaux qui sortaient du lot quels que soient les époques ou le format de la sortie. En tout et pour tout, j’ai toujours chez moi 6 de leurs CD et leur DVD, ce qui est un beau ratio. Bref, tu l’auras compris cher lecteur : il s’agit d’un des groupes phares de ma jeunesse. Pas besoin de préciser qu’apprendre la mort de leur batteur un triste vendredi soir m’a peiné, et a surtout marqué la fin d’une époque.
Séparés depuis 2013, j’avais toujours le secret espoir d’une reformation, avec la planification d’une tournée triomphale et, pourquoi pas, un nouvel album. En 2018 pourtant, ils se sont reformés pour quelques dates, avec en point d’orgue l’affiche du Hellfest, sur invitation des Burning Heads célébrant leurs 30 ans de carrière. Hélas, cette reformation n’avait pas pour vocation de s’éterniser.
Savoir que les moments passés à écouter leurs chansons au beau milieu d’un pit sont plus que jamais voués à rester de merveilleux souvenirs, c’est définitivement une page de mon adolescence et de ma vie de jeune adulte qui se tourne. Comme beaucoup d’autres fans de punk ayant grandi dans les années 2000, ce groupe est culte à mes yeux et ne passera jamais de mode : les morceaux tourneront encore et encore, quel que soit le format. L’influence qu’ils auront eue (et qu’il aura eue) sur bon nombre de groupes et de fans est encore perceptible de nos jours.
Pour tout ça, merci Daff. Merci pour les bonnes ondes, et repose en paix.
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